mercredi 7 juillet 2010

Un autre assassinat d’un militant des droits de l’homme

Trois semaines après l'assassinat du président de la Voix des sans voix (VSV), Floribert Chebaya, un autre militant des droits de l'homme, Muhindo Salvator, a été abattu à son domicile de Kalunguta à 20 km de Beni. Il a été tué par des hommes en armes dans la nuit de mardi à mercredi 30 juin 2010. Muhindo Salvator avait été le grand animateur de la campagne de boycott des festivités du 30 juin marquant le cinquantième anniversaire de l'indépendance du pays, pour protester contre la mort de Floribert Chebeya.

Selon un communiqué de la société civile de Beni : "des hommes en armes et tenue militaire ont assiégé sa résidence dans la nuit de mardi à mercredi vers une heure du matin. Ils ont exigé sa présence. La femme de la victime s’étant présentée la première, les assaillants ont menacé de l’exécuter si son mari ne se présentait pas. Sorti de sa cachette, les assaillants ont logé une balle dans la poitrine de M. Muhindo. Il en est mort sur le coup, selon la société civile de Beni. Le corps de la victime a été enterré hier mercredi 30 juin, au moment où les Congolais commémoraient le cinquantenaire de l’indépendance du pays".
Pour rappel, les membres de la société civile avaient annoncé depuis deux semaines leur intention de ne pas participer aux festivités du 30 juin. Ils voulaient ainsi protester contre la mort le 2 juin dernier du directeur exécutif de l’ONG La Voix des sans voix, Floribert Chebeya.

Plus d'infos sur

www.afrikarabia.com

vendredi 18 juin 2010

RDC : Les fauteurs de guerre

DSC03855 copie.jpgDepuis plus de 10 ans, l'Est de la République démocratique du Congo (RDC) est le théâtre de guerres à répétition. Au premier rang des responsables de ce conflit sans fin, de multiples mouvements rebelles soutenus par le Rwanda ou l'Ouganda ainsi que le pouvoir congolais incapable d'assurer la sécurité sur son territoire et coupable d'exactions sur les populations civiles. Voici le portrait des différents groupes armés impliqués dans cette guerre qui ne veut pas finir.
FDLR : Les Forces démocratiques de libération du Rwanda
Premier sur la liste des mouvements rebelles, les FDLR se composent d’anciens membres de l’armée du président Juvénal Habyarimana et de miliciens Interahamwe. Après avoir été mis en déroute par les soldats du président Paul Kagamé à la suite du génocide, ils s’étaient regroupés en RDC pour fomenter une reprise du pouvoir à Kigali, en formant un groupe armé qui a finalement donné naissance aux FDLR. L’ancien président congolais Laurent-Désiré Kabila a conclu une alliance avec les FDLR pour lutter contre l’influence de Kigali dans l’est du Congo après 1998 et certains membres ont intégré son armée. Mais Joseph Kabila, son fils, aujourd’hui à la tête de l’Etat congolais, a autorisé les troupes rwandaises à pénétrer en RDC en 2009 pour traquer les FDLR. Selon les estimations des sources du secteur onusien de la sécurité, les FDLR comptent aujourd’hui 3 000 hommes, contre 6 000 en 2009.

Le groupe a un bras armé, les FOCA (Forces combattantes Abacunguzi), actives dans le Sud-Kivu. Les FDLR se sont alliées à d’autres groupes, notamment aux Forces républicaines fédéralistes (FRF) de Michel Rukunda, une milice du Sud-Kivu qui déclare défendre les intérêts des Banyamulenges (Tutsis congolais), et à certains groupes Maï-Maï.

Les Maï-Maï
Leurs combattants, qui s’aspergent « d’eau magique pour se protéger des balles », sont pour la plupart membres de milices d’autodéfense ad hoc, formées par les leaders locaux, qui arment de jeunes hommes dans les villages, souvent en fonction des différences ethniques. Certaines grandes milices Maï-Maï sont plus connues, notamment les Patriotes résistants congolais (PARECO) ou l’Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (APCLS), qui se sont jointes au processus de paix en mars 2009, en promettant de se convertir en partis politiques pacifiques.
Le 2 juin, 500 membres du groupe Maï-Maï Kifuafua ont de nouveau rejoint leurs positions, à Walikale, dans le Nord-Kivu, soutenant que leur intégration convenue au sein de l’armée avait trop tardé. La plupart des groupes Maï-Maï sont des forces locales portant le nom de leur chef. Le groupe Yakutumba, du nom du « major-général » qui le dirige, a enlevé huit travailleurs humanitaires au Sud-Kivu, en avril.
CNDP : Le Congrès national pour la défense du peuple
Le CNDP a menacé d’envahir Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, en novembre 2008. Par la suite, le Rwanda a assigné à résidence Laurent Nkunda, son chef. Bosco Ntaganda, inculpé par la Cour pénale internationale (CPI), a remplacé Laurent Nkunda et accepté d’orienter le mouvement vers la paix. En mars 2009, le CNDP s’est converti en parti politique et 3 000 à 4 000 de ses combattants ont intégré l’armée congolaise. Environ 1 000 à 2 000 autres résistent à l’intégration.
Selon la plupart des experts, le CNDP a conservé ses chaînes de commandement au sein de l’armée. Le groupe, qui administre en grande partie le district de Masisi, se livre à diverses activités dans le Nord-Kivu, de l’exploitation minière artisanale au trafic de charbon, en passant par l’extorsion. Il est accusé d’avoir organisé le transfert de ses partisans rwandais à Masisi, ce qui a provoqué des frictions entre les Rwandais de RDC et les autres groupes ethniques.
FPLC : Les Forces patriotiques pour la libération du Congo
Ce groupe, actif dans le Nord-Kivu, est dirigé par le général Gad Ngabo, qui a récemment franchi la frontière ougandaise pour pénétrer dans le territoire congolais de Rutshuru. Selon différentes sources, le général recruterait au sein de différentes ethnies, regroupant des forces pour disputer au CNDP le contrôle de certaines zones du Nord-Kivu. Ce groupe compterait quelques centaines de combattants.

ADF/NALU : Les Forces démocratiques alliées/Armée nationale de libération de l'Ouganda
Quoique converti plusieurs fois à l’islam et au catholicisme, Jamil Mukulu, chef rebelle ougandais, a fondé un groupe militant musulman au début des années 1990. Sous la pression de l’armée ougandaise, il y a enrôlé des officiers du régime de l’ancien dictateur Amin Dada et l’a fusionné avec la NALU, autre mouvement rebelle ougandais qui abriterait les partisans de l’ancien président Milton Obote.
Depuis qu’elle a franchi la frontière pour pénétrer en RDC, au milieu des années 1990, cette milice est restée dans la zone de Beni, dans le Nord-Kivu. Selon les analystes, il s’agit d’un groupe « à l’état latent », comptant environ 1 300 hommes. Des pourparlers de paix entre l’ADF/NALU, l’Ouganda et la RDC ont été engagés en 2009, sous la médiation des Nations Unies, mais en avril, l’armée congolaise a attribué à une coalition entre les ADF/NALU et des combattants Maï-Maï locaux la responsabilité d’une attaque meurtrière perpétrée contre un centre d’entraînement militaire situé à Beni.
LRA : L’Armée de résistance du Seigneur
Joseph Kony a fondé la « Holy Spirit Mobile Force 2 » (Deuxième Force mobile du Saint-Esprit) dans le nord de l’Ouganda en 1987, après la mise en déroute d’un groupe rebelle du même nom par le gouvernement du président Yoweri Museveni, auquel celui-ci tentait de s’opposer. En 1989, Joseph Kony a rebaptisé la milice l’Armée de résistance du Seigneur, déclarant avoir pour objectif d’instaurer en Ouganda une théocratie d’inspiration chrétienne.
La LRA s’est d’abord introduite au Sud-Soudan au milieu des années 1990, mais l’accord de paix soudanais de 2005 et l’inculpation de Joseph Kony par la CPI a forcé le groupe à se réfugier en RDC, dans le parc national de la Garamba. En décembre 2008, les armées ougandaise, sud-soudanaise et congolaise ont lancé une offensive collective à la Garamba, sans pourtant réussir à éliminer l’état-major de la LRA. Le groupe, divisé en petites unités, se déplace à pied dans les Uélés (districts situés dans le nord-est du Congo), dans l’est de la République centrafricaine (RCA) et dans certaines régions du Sud-Soudan.
Entre décembre 2007 et avril 2010, le groupe aurait tué 1 796 civils et en aurait enlevé 2 377 au Congo. Il est particulièrement connu pour recruter de force des enfants soldats, transformer de jeunes garçons en tueurs et utiliser des fillettes comme porteuses ou comme esclaves sexuelles. Les membres du groupe mutilent également les lèvres et les oreilles de leurs victimes pour terroriser la population.
FRPI/FPJC : La Force de résistance patriotique en Ituri/Front populaire pour la justice au Congo
La FRPI et sa faction dissidente, le FPJC, sont actifs dans le sud de l’Ituri, où ils combattent les forces du gouvernement et les forces onusiennes de maintien de la paix. Germain Katanga, ancien commandant de la FRPI, comparaît actuellement devant la CPI aux côtés de deux autres chefs miliciens de l’Ituri pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité ; il est notamment accusé d’avoir recruté des enfants soldats, et de s’être rendu coupable de massacres de masse et de viols. Selon les analystes, ce groupe est « résiduel », mais ses répercussions humanitaires restent importantes.
En 2009, environ 5 000 personnes ont fui pour se réfugier dans la forêt de Mokato-Ngazi à la suite d’affrontements entre l’armée congolaise et les militants des FRPI/FPJC. Lorsque les forces gouvernementales et les organisations humanitaires sont parvenues à se rendre dans la zone, trois mois plus tard, un nombre indéterminé de ces déplacés étaient morts de faim. Jean-Claude Baraka, chef du FPJC, a récemment été arrêté. En revanche, le « Colonel Cobra » Matata, chef de la FRPI, qui avait accepté d’intégrer l’armée nationale, aurait déserté au début du mois pour rejoindre sa milice, en Ituri.
Enyele/Le Mouvement de libération indépendant et alliés (MILIA)
Des tensions ethniques datant de l’époque coloniale ont éclaté en novembre dernier dans la province d’Equateur, dans le nord-ouest du pays. Les membres du groupe Lobala, connu sous le nom « d’Enyele », du nom du village où les flambées de violence ont éclaté pour des questions de droits de pêche, ont d’abord attaqué la ville frontalière de Dongo, mettant en déroute les forces de police qui avaient été déployées pour les réprimer. Les civils ont fui de l’autre côté du fleuve, en République du Congo, et seuls 20 000 habitants sont revenus.
Adoptant l’acronyme MILIA, le groupe s’est déplacé vers le sud, à travers la jungle, prenant d’assaut Mbandaka, le chef-lieu de la province, le 4 avril. Il a également perturbé le ravitaillement des populations jusque dans la ville de Kisangani, à l’est.
Le 5 mai, la RDC a arrêté Ondjani Mangbama, le chef des insurgés Enyele, mais la situation de ce dernier reste incertaine. L’insurrection Enyele a commencé dans la province d’Equateur, province natale de l’ancien dirigeant congolais Mobutu Sese Seko, aujourd’hui devenue le bastion du MLC, parti d’opposition de Jean-Pierre Bemba.
Les Forces armées de République démocratique du Congo (FARDC)
Il ne s'agit pas là d'un mouvement rebelles, mais de l'armée nationale. Mais les FARDC ont été accusées par les organisations de défense des droits humains de se livrer à des activités criminelles, ce que le gouvernement réfute. En 2009, leur 213e brigade a été citée comme responsable des pertes civiles subies à Lukweti, au Nord-Kivu, au cours de l’offensive Kimia 2, menée contre les FDLR avec le soutien des Nations Unies.

dimanche 6 juin 2010

Assassinat Chebaya : John Numbi mis en cause

L'étau se resserre autour des commanditaires du meutre du militant des droits de l'homme, Floribert Chebaya. La pression internationale pousse les autorités de Kinshasa à faire vite... et une fois n'est pas coutume, l'enquête progresse rapidement. Le chef de la police de la République démocratique du Congo (RDC) a été suspendu et plusieurs officiers de police ont été arrêtés. John Numbi, réputé très proche du président Kabila, a été suspendu à titre conservatoire afin que l'enquête se déroule sereinement... une première en RDC.

L'officier arrêté, le colonel Daniel Mukalay, chef des services spéciaux de la police, serait passé aux aveux. Selon les diverses agences de presse, il aurait déclaré n'être qu'un simple un exécutant et aurait mis en cause le chef de la police, le général John Numbi. Selon le ministère de l'Intérieur congolais, John Numbi a été placé en résidence surveillée.

L'indignation avait été grande à l'annonce de l'assassinat du président de l'ONG la Voix des sans-voix (VSV), Floribert Chebeya. Le monde entier s'était ému de la fin tragique de ce militant des droits de l'homme de 47 ans, retrouvé mort à l'arrière de sa voiture sur une route de Kinshasa.

L'ONU, les Etats-Unis, l'Union Européenne et 55 ONG internationales ont immédiatement fait pression sur Kinshasa pour que l'enquête se déroule dans les meilleurs délais et soit irréprochable. L'appel a visiblement été entendu par les autorités congolaises... à quelques jours du cinquantième anniversaire de l'indépendance de la RDC. L'assassinat du plus célèbre militant des droits de l'homme congolais pourrait même compromettre la visite d'Albert II de Belgique aux festivités du 30 juin à Kinshasa... un meutre qui tombe bien mal pour Joseph Kabila.

vendredi 4 juin 2010

RDC : La Voix des Sans Voix assassinée !

Mauvais jour pour la démocratie. La nouvelle tragique de l’assassinat de Floribert Chebeya a soulevé une vague d’indignation unanime à Kinshasa. Ce défenseur des droits de l’homme, reconnu et respecté, a été retrouvé mort dans sa voiture sur une route à la sortie de Kinshasa en allant vers la province du Bas-Congo. Qui a donc voulu faire taire la Voix des sans voix ?

Image 1.pngD’après les premiers éléments, son corps a été retrouvé sur le siège arrière de sa voiture et ne portait pas de traces apparentes de violence. Son ONG (la Voix des Sans Voix) avait auparavant publié un communiqué, s’inquiétant de la disparition de son président et de son chauffeur qui n’avaient plus donné de nouvelles après s’être rendus à l’Inspection générale de la police nationale congolaise pour y rencontrer John Numbi.

Les condamnations sont unanimes : la directrice adjointe du programme Afrique d'Amnistie, Véronique Aubert, a indiqué que le groupe était «stupéfait et consterné par la mort suspecte d'un défenseur des droits humains aussi reconnu et respecté». Elle a ajouté que M. Chebeya avait déjà été harcelé par les autorités dans le passé et qu'«il semble avoir payé le prix ultime pour son important travail».

Amnistie internationale affirme avoir noté de plus en plus de cas de harcèlement de militants pour les droits humains en République démocratique du Congo dans la dernière année… une bien mauvaise nouvelle pour la démocratie en RDC.

mardi 1 juin 2010

Joseph Kabila boude le sommet Afrique-France

La République démocratique du Congo brillera par son absence au XXVe sommet Afrique-France de Nice. Le président Kabila sera une nouvelle fois absent d'un grand rendez-vous international. On sait que le président congolais n'apprécie guère ce genre d'événement... mais cette absence fera d'autant plus remarquée la présence du président rwandais Paul Kagame avec qui, Nicolas Sarkozy souhaite poursuivre son rapprochement diplomatique.

afrique.jpg38 dirigeants africains participeront à partir de lundi au XXVe sommet Afrique-France, qui se veut celui de la normalisation des relations entre le continent et l'ancienne puissance coloniale. Cette édition sera fortemment oritentée vers l'économie. Si les chefs d'Etat gardent la main sur les grandes questions abordées à huis clos (place de l'Afrique dans la gouvernance mondiale, renforcement de la paix et sécurité, climat et développement), pour la première fois, la rencontre est ouverte à des acteurs non étatiques. Cinq ateliers rassembleront les représentants de 150 entreprises africaines et 80 françaises.

Joseph Kabila sera toutefois représenté durant ce sommet par son ministre des Affaires étrangères, Alexis Thambwe Mwamba. L'absence du président Kabila met la France en difficulté pour ce sommet. Paris aurait souhaité pouvoir réunir autour d’une même table les dirigeants des pays des Grands Lacs (Burundi, Ouganda, RDC et Rwanda) et renforcer ainsi son influence dans la région... une occasion ratée pour Nicolas Sarkozy

lundi 17 mai 2010

MONUC: quand retirer le plâtre?

Sans atermoiements funestes et sans précipitation inconsidérée : cette formule célèbre, utilisée par le Roi Baudouin à propos de l’indépendance du Congo pourrait être reprise par le Conseil de Sécurité dont une délégation se trouve ce week end à Kinshasa. Initialement prévue pour avril, et retardée à cause du nuage finlandais, la délégation doit examiner les modalités du retrait de la Mission des Nations unies au Congo. « Il n’y aura pas de négociation, nous avons pris acte de la demande des autorités congolaises » a déjà déclaré un porte parole de l’ONU.
Il ya plusieurs mois déjà que le gouvernement congolais a déclaré qu’il souhaitait que la mission de la Monuc prenne fin d’ici novembre 2011 et un premier retrait de 2000 hommes devrait avoir lieu durant l’été 2010. Kinshasa espère aussi un redéploiement des effectifs, où les 18000 Casques bleus restants, jusqu’à présent déployés à travers tout le pays se concentrent sur les provinces de l’Est, où des opérations militaires sont toujours en cours, afin de démanteler les bases des rebelles hutus. Dans la foulée du 50eme anniversaire de l’indépendance du pays : à titre symbolique, le président Kabila souhaite que cette mission, qui représente une certaine tutelle de la communauté internationale, donne des gages de retrait afin de « responsabiliser » les autorités nationales.
La réalité est cependant moins simple : la Mission des Nations unies au Congo, la plus vaste des opérations de paix, totalise déjà dix ans dans le pays. Avec les milliers de fonctionnaires de son administration, de sa flotte aérienne, la plus importante d’Afrique, avec sa logistique et ses 20.000 Casques bleus, elle représente pratiquement un Etat dans l’Etat. Les Congolais éprouvent à l’égard de cette mission qu’ils appellent souvent « Monique » des sentiments partagés. Au Kivu, les populations civiles reprochent bien souvent aux Casques bleus de ne pas intervenir lors des massacres, de se contenter de compter les victimes et de publier des rapports. « Nous préférerions une coopération militaire avec un pays ami, ce serait plus simple et plus clair, car la Monuc, nous ne savons jamais ce qu’elle fait exactement, ni quels sont ses objectifs réels » assure Sylvain, un militant de la société civile. De Kiwandja à Bukavu, les exemples de l’impuissance ou de l’indifférence des Casques bleus sont légion. Cependant, les autorités reconnaissent que lors des opérations Kymia II ou Amani Leo, menées contre les rebelles hutus, le soutien logistique et même militaire de la Monuc a été décisif, tandis qu’en 2008, ce sont les mêmes Casques bleus qui ont empêché la ville de Goma de tomber aux mains du chef rebelle Laurent Nkunda.
Lors du dernier week end pascal, ce sont les casques bleus présents à M’Bandaka, la capitale de l’Equateur, qui ont aidé les troupes gouvernementales à défaire les rebelles Enyele qui s’étaient emparés de la ville et dont le chef vient d’être arrêté.
Si les Casques bleus, malgré le mandat de « peace making » (imposer la paix) dont ils disposent, sont souvent critiqués, les institutions civiles de la Monuc jouent un rôle important, qu’il s’agisse de l’observation des droits de l’homme ou de l’information, Radio Okapi, émettant sur l’ensemble du territoire, représentant la plus fiable des sources d’information.
Ces relais « civils » de la Monuc, s’ajoutant à sa logistique, sont également très utiles aux innombrables organisations internationales déployées au Congo qui multiplient enquêtes, rapports et mises en garde. Cet aspect de la « tutelle » internationale agace souvent les autorités et d’aucuns assurent que si le pouvoir souhaite que la Monuc plie bagages c’est aussi afin de réduire le nombre d’observateurs extérieurs. Par ailleurs, même si les infrastructures sont en train d’être reconstruites, il paraît difficile, en l’état actuel du pays, d’organiser les élections prévues pour 2011 en se passant de la logistique et de l’appui onusien. C’est pourquoi bon nombre d’organisations, comme Eurac (réseau européen pour l’Afrique centrale) plaident en faveur du maintien de la Monuc tandis que le gouvernement invoque sa souveraineté…
Le Ministre belge des Affaires étrangères Steven Vanackere a pour sa part préconisé une autre solution qu’un simple calendrier de retrait : il souhaite que le retrait graduel soit lié moins à des dates qu’à la réalisation d’objectifs. Parmi ceux ci figure évidemment le maintien de la paix, le renforcement des capacités de l’Etat, la protection des civils, la mise en place d’un état de droit. Ce point de vue, partagé par les Etats unis, rejoint celui du secrétaire général de l’ONU, qui craint un retrait précipité. Alors que les autorités congolaises estiment que, d’ici un an, l’armée gouvernementale devrait être à même d’assumer ses responsabilités et de maintenir la paix, la communauté internationale, après dix années de présence, estime, comme M. Vanackere, que le Congo aura encore besoin des efforts de l’ONU pendant quelques années. A quel moment le blessé peut-il être considéré comme guéri de ses fractures et à l’abri de nouvelles rechutes? Pour le savoir, il faut retirer le plâtre, mais une telle décision est difficile à prendre…

dimanche 16 mai 2010

RDC : Pas de départ précipé pour la MONUC

28 délégués du Conseil de sécurité de l'ONU sont en République démocratique du Congo (RDC) pour essayer de convaincre le gouvernement congolais d'un retrait progressif de ses casques bleus. Kinshasa souhaiterait un départ rapide des 20 000 soldats de la paix et ce, avant les festivités du cinquantième anniversaire de l'indépendance du Congo le 30 juin. Alors que le Kivu, l'Ituri et l'Equateur sont toujours le théâtre de violents affrontements, le départ précipité des troupes de la MONUC risquerait de relancer les combats moins d'un an avant les élections présidentielles.

Logo ONU 2.jpgLes diplomates de l'ONU doivent rencontrer le Premier ministre Adolphe Muzito et les dirigeants parlementaires avant de gagner Inga, à 350 km de Kinshasa pour des entretiens avec le président Kabila. Le mandat de la MONUC prendra fin au mois de mai 2010. Séraphin Ngwej, conseiller diplomatique de Kabila, a toutefois déclaré à Reuters que 2011 était "une date limite raisonnable" pour le retrait de la mission. Pour l'instant l'ONU propose de retirer 2 000 soldats de RDC d'ici le 30 juin. Si ce retrait partiel est approuvé par le Conseil de sécurité et les autorités congolaises, il sera alors suivi d'un "désengagement progressif basé sur l'évolution du risque de sécurité que connaît le pays" selon un diplomate français. Les casques bleus assurent un appui logistique et participent quelquefois aux combats aux côtés d'une armée nationale fragile, qui peine à contenir une série de groupes rebelles locaux et étrangers. Un prêtre du Sud-Kivu, cité par l'AFP "suggère que la MONUC restent encore deux ans, car il faut qu'ils soient là pour les élections", précise le père Albert, prêtre catholique en mission à Mwenga.