mercredi 4 mai 2011

Rwanda: les chefs de la rébellion hutu devant la justice allemande

Rwanda: les chefs de la rébellion hutu devant la justice allemande

De Audrey KAUFFMANN (AFP) – Il y a 11 heures

STUTTGART — Un tribunal de Stuttgart, dans le sud-ouest de l'Allemagne, a commencé mercredi à juger le chef de la rébellion rwandaise hutu des FDLR, Ignace Murwanashyaka, et son adjoint Straton Musoni pour crime contre l'humanité et crime de guerre en République démocratique du Congo.

Le procès, qui s'est ouvert peu après 07H30 GMT, a été immédiatement suspendu, avant même la lecture de l'acte d'accusation, car la défense a déposé une motion contestant la composition du parquet.

"Il est permis de douter de la neutralité du parquet fédéral", a argué Ricarda Lang, avocate d'Ignace Murwanashyaka.

Selon elle, "le procès ne peut pas continuer" avec les représentants actuels de l'accusation car l'un d'eux au moins doit être entendu comme témoin devant la cour pour rapporter le contenu d'auditions réalisées pendant l'enquête en RDC et au Rwanda. Or on ne peut selon l'accusation à la fois témoigner et accuser dans un procès. Elle a en outre affirmé que tous les éléments du dossier n'avaient pas été transmis à la défense et contesté les conditions d'audition de certains témoins, sans traducteur.

Les juges ont demandé au parquet de préparer sa réponse et le procès devait reprendre en fin de matinée.

Arrêtés en novembre 2009, les deux hommes sont accusés de diriger "une organisation terroriste" et d'avoir piloté à distance des atrocités commises par les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) en 2008 et 2009 contre des centaines de civils dans l'est de la République Démocratique du Congo où elles sont basées: plus de 200 meurtres, de très nombreux viols, pillages et incendies de village, le recrutement d'enfants-soldats.

Ils encourent la réclusion à perpétuité.

Arrivés menottés, Ignace Murwanashyaka, 47 ans, et Straton Musoni, 50 ans, ont comparu à Stuttgart dans une petite salle pleine --70 personnes dans le public--, flanqués chacun de plusieurs avocats. M. Murwanashyaka en jeans et chemise mauve, lunettes argentées, et M. Musoni en costume vert pale et cravate bariolée.

M. Murwanashyaka préside les FDLR depuis fin 2001. Recherché par Kigali et objet de sanctions de l'ONU depuis 2005, il vit depuis plus de deux décennies en Allemagne, tout comme Straton Musoni, vice-président des FDLR depuis 2004. Les deux hommes, venus étudier en Allemagne, y ont fait leur vie.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avait salué en janvier le fait que l'Allemagne ait entendu les "appels répétés" de l'ONU et traduise en justice les chefs des FDLR. Une démarche qui peut selon lui contribuer à "la stabilisation" de l?est de la RDCongo.

Quatre-vingts témoins sont cités dans le dossier de l'accusation, épais de 150 classeurs.

Ce procès est le premier organisé selon les dispositions du Code allemand sur les crimes violant le droit international, introduit en 2002 sur le principe de la compétence universelle. Après l'Holocauste, l'Allemagne s'était dotée des moyens de punir le génocide. Le nouveau Code intègre toutes les atteintes relevant de la Cour pénale internationale, crimes de guerre et crimes contre l'humanité inclus.

Les FDLR comptent entre 2.500 et 5.000 combattants hutus dans la région des Grands Lacs, selon les sources. Kigali en recherche certains pour leur rôle présumé dans le génocide au Rwanda en 1994, qui a fait 800.000 morts selon l'ONU, majoritairement d'ethnie tutsi

lundi 28 mars 2011

RDC : Kinshasa examine un "découplage" de la présidentielle et des législatives

président de la RDC Joseph Kabila, le 24 octobre 2010 à Montreux, en Suisse.© AFP

Le président congolais Joseph Kabila a réuni les plus hautes personnalités de l'État pour évoquer un report des élections législatives, qui doivent être organisées en même temps que la présidentielle en fin d'année. La signature d'un accord avec les rebelles des FDLR a aussi été annoncée.

Dans l’après-midi du 14 mars, Joseph Kabila a réuni pendant plus de deux heures les plus hauts responsables de l’État au Palais du peuple. Parmi les présents : le procureur général, le Premier ministre, celui de l’Intérieur, les présidents du Sénat, de l’Assemblée nationale et de la Commission électorale nationale indépendante. Les participants ont examiné de près le scénario d’un « découplage » de la présidentielle et des législatives. La première pourrait se tenir en octobre prochain, les secondes au début de 2012. Un moyen pour le chef de l’État fraîchement élu de profiter, lors des législatives, de la tendance des électeurs à voter pour le vainqueur de la présidentielle. Et donc de s’assurer la haute main sur le Parlement. C’est la preuve que l’argument avancé, en janvier, pour justifier la suppression du second tour de la présidentielle – la nécessité de faire des économies – n’était qu’un prétexte. Le découplage nécessite en effet l’organisation de deux scrutins au lieu d’un.

Accord avec les FDLR

La signature prochaine d’un accord avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) a par ailleurs été annoncée à l’issue de la réunion. Le groupe rebelle, qui compte dans ses rangs d’anciens génocidaires, menace en effet la paix dans le Nord et le Sud-Kivu. Il sera « relocalisé » dans une autre province congolaise, le Maniema. L’accord porte sur 1 500 combattants.

Rwanda : Le général Didier Tauzin défend le rôle de l'armée française pendant le génocide

« Rwanda : je demande justice pour la France et ses soldats » est le dernier ouvrage du Général Didier Tauzin aux éditions Jacob-Duvernet. Chef du 1er RPIMA de 1994 à 1996 et patron de l'opération Chimère et Turquoise au Rwanda, Didier Tauzin s'explique sur les accusations de complicité de génocide qui planent autour de l'armée française. Le journaliste et écrivain Jean-François Dupaquier, spécialiste du Rwanda, décrypte cet ouvrage pour AFRIKARABIA.
Capture d’écran 2011-03-27 à 14.35.56.pngL’ouvrage du général Didier Tauzin est un plaidoyer pour le rôle de la France – et surtout de l’armée française - au Rwanda entre 1990 et 1994, rôle qu’il estime incompris, voire outrageusement stigmatisé. Didier Tauzin, alors colonel, était intervenu à deux reprises au Rwanda : quelques semaines en février-mars 1993 pour contrer l’offensive du FPR, dans le cadre de l’opération secrète Chimère (dite aussi « Birunga ») en marge du dispositif « Noroît », et encore quelques semaines (entre juin et juillet 1994) lors de l’opération Turquoise pour « sécuriser » la frange sud-ouest du Rwanda.
Le récit qu’apporte Didier Tauzin sur les événements qu’il a vécus, surtout en 1993, est précis et intéressant sur les faits, toujours exalté et souvent incohérent sur les analyses. Nous faisons référence aux pages 61 à 88 du manuscrit pour l’opération Chimère de 1993, et 105 à 148 pour Turquoise. Soit au total quelque 70 pages sur un court ouvrage de 196 pages sans compter les annexes. Les informations avancées renouvellent et approfondissent la connaissance des deux épisodes, vus du côté des militaires français. Ce ne sont malheureusement que des brèves parties d’un projet qui vise à répondre aux critiques sur le rôle de la diplomatie et de l’armée française au Rwanda. Dans cette perspective, l’ouvrage de Didier Tauzin devient lui-même essentiellement polémique. N’ayant pas l’art du pamphlétaire, il laisse apparaître de nombreuses faiblesses, comme la volonté d’en découdre avec le journaliste Patrick de Saint-Exupéry et son livre « Complices de l’inavouable », où Didier Tauzin est épinglé. Si le militaire a été blessé par les critiques, il en fait une véritable obsession et s’affaiblit d’autant.
Nourrir la polémique sur le rôle de la France de François Mitterrand au Rwanda n’était pas en soi un mauvais projet. Mais d’autres militaires ont déjà pris la plume pour défendre la même cause que Didier Tauzin et dans un format similaire : le colonel Jacques Hoggard avec « Les Larmes de l’honneur », un petit livre bien écrit publié en 2005 (Ed. Poche), et le général Lafourcade avec « Opération Turquoise » en 2010 (Ed. Perrin), beaucoup plus primaire.
La version du général Tauzin du génocide des Tutsi de 1994 (qu’il écrit généralement « génocide » entre guillemets) ne peut qu’embarrasser les défenseurs du rôle de l’armée française au Rwanda, notamment en raison de considérations plutôt approximatives, voire naïves, sur un prétendu atavisme tutsi, sur les colonisations successives du Rwanda, etc., qui échappent visiblement à son entendement. Son préfacier Jean-Dominique Merchet, par ailleurs journaliste à Marianne, en est bien conscient qui prévient : « A la fois témoignage et coup de gueule, il faut le lire pour ce qu’il est.

Les spécialistes de l’histoire et de l’anthropologie du Rwanda trouveront sans doute à y redire, ici ou là. Qu’importe ! Didier Tauzin n’a pas écrit un livre savant, désincarné. C’est d’un homme dont il s’agit, pur produit de l’armée française telle qu’elle est, avec ses grandeurs et ses naïvetés ». Ce « déminage » préliminaire ne suffira pas à légitimer l’ouvrage. L’armée française dont se réclame Didier Tauzin, et avant lui l’ensemble des protagonistes de l’association « France Turquoise », n’a aujourd’hui que faire de ces vieilles badernes qui ressassent un cuisant échec, militaire mais surtout politique, au Rwanda. Dans un éclair de lucidité, le général Didier Tauzin observe que les dégâts provoqués par l’équipée française au Pays des Mille Collines ont été immenses : « Elle a depuis lors perdu la confiance des Africains et perdu sa confiance en elle-même en politique africaine. Elle n’est plus qu’un acteur marginal de la scène africaine, un second rôle, souvent un figurant… quand elle est présente. »

Dommage qu’il faille attendre les dernières pages pour trouver une observation sensée, qui contredit l’essai hagiographique qu’on aura lu précédemment. A l’exception de ces quelques lignes qui lui auront échappé, le général Didier Tauzin apparaît comme un va-t-en-guerre aux idées courtes, ce qui a limité la fin de sa carrière à une pénible ascension au grade de général dans les soupentes du ministère de la Défense. Loin du Rwanda et de ses mirages…
Jean-François DUPAQUIER
Didier Tauzin, Rwanda l'honneur bafoué de la France, Paris, Editions
Jacob-Duvernet ISBN : 978-2-84724-335-2 ; EAN : 9782847243352 . Dimensions :
15,5cm x 24,2cm x 2,1cm. 19,90 euros.

NDLR : J’ai eu l’occasion de le rencontrer durant l’opération Turquoise à Goma.

Fait marquant, il avait ouvert son hôpital de campagne militaire aux civils rwandais les plus touchés.

dimanche 27 mars 2011

Rwanda : 2 présumés génocidaires, protégés du régime rwandais, arrêtés en Belgique

Ernest Gakwaya, alias "Camarade" et Emmanuel Nkunzuwimye, dit "Bomboko", ont été arrêtés le 23 mars 2011 à Bruxelles. Les deux hommes ont été inculpés pour leur rôle présumé dans le génocide de 1994 au Rwanda. Ils avaient pourtant été les invités officiels de Paul Kagame en décembre dernier dans le cadre du programme "Comme and see", un dispositif de réconciliation lancé en 2010 par le gouvernement rwandais.
Capture d’écran 2011-03-26 à 10.30.24.pngDeux Rwandais, présumés génocidaires, membres éminents de la diaspora rwandaise en Belgique, Ernest Gakwaya, dit « Camarade » et Emmanuel Nkunzuwimye, dit « Bomboko », ont été arrêtés le 23 mars au matin à Bruxelles. Malgré son appartenance supposée aux Interahamwe pendant le génocide de 1994, Gakwaya était retourné sans encombres au Rwanda dans le cadre du programme « Come and see » en décembre dernier. Ce programme, initié par le gouvernement rwandais, consiste à inviter des membres de la diaspora rwandaise au Rwanda, afin de les réconcilier avec le pouvoir en place et les pousser à un retour définitif. Le 21 décembre dernier, pour la fin de la conférence sur le Dialogue National, Ernest Gakwaya était intervenu pour remercier le président du Rwanda Paul Kagame de sa générosité à l’égard des Rwandais vivant à l’étranger.
Selon l’Office rwandais d’information (ORINFOR), un service officiel chargé de relayer les vues des autorités nationales, Ernest Gakwaya avait déclaré à la suite de son voyage au Rwanda: "le constat sur le terrain diffère des informations diffusées dans son pays hôte sur la situation au Rwanda. Je ne savais pas que les Rwandais pouvaient s’asseoir et discuter ensemble. L’on est comme des naufragés qui viennent d’être sauvés par la police. Je m’engage à sensibiliser les autres réfugiés à contribuer au développement du pays pour l’accélérer." ajoutait Ernest Gakwaya, selon l’ORINFOR.
Les rescapés ont été ulcérés par ce programme et notamment de l’invitation d’Ernest Gakwaya. Celui-ci a quitté le Rwanda en 1994 en plein génocide. Selon diverses sources, il avait auparavant participé aux massacres dans le quartier de Nyamirambo, bastion des miliciens interahamwe, avant de comprendre que la guerre était perdue et d’en tirer des conséquences pour sa sécurité personnelle en trouvant asile en Belgique où il avait cherché à se faire oublier.
Selon les rescapés, Gakwaya était l'un des interahamwe les plus actifs pendant le génocide. Quant à Nkunzuwimye, il est considéré comme un proche de Jean-Marie Vianney Mudahinyuka, condamné par contumace à 19 ans de prison au Rwanda. Résident aux Etats-Unis, Mudahinyuka a été remis au Rwanda, en janvier dernier par la section Interpol des Etats-Unis.
Paradoxalement, Gakwaya et Nkunzuwimye auraient peut-être continué à couler des jours paisibles s’ils n’avaient pas fait parler d’eux dans le cadre de l’opération « Come and See » de décembre dernier. Ou s’ils étaient restés au Rwanda !
De son côté le site officiel rwandais « New Times » rend compte de l’arrestation des deux hommes en oubliant de préciser qu’ils étaient voici trois mois des invités officiels du gouvernement.

mardi 15 mars 2011

RDC : Une BD contre le sida

"Les diamants de Kamituga" est une bande dessinée pas comme les autres. Ce "thriller humanitaire" du congolais Séraphin Kajibwami nous plonge dans le quotidien des habitants de la République démocratique du Congo. L'album raconte l'histoire d'Agha, mère de famille atteinte du Sida. Bien plus qu'une simple BD, ce livre constitue un outil de prévention et d’information contre le sida. 100 000 exemplaires des Diamants de Kamituga seront distribués à Bukavu et dans la région. L’intégralité des bénéfices de la vente en France sera reversée à l’association SOS Sida.
Capture d’écran 2011-03-14 à 21.42.35.pngLes Diamants de Kamituga a été réalisé dans le cadre d’un projet de développement social porté par African Artists for Development (AAD). Distribuée gratuitement par AAD à 100 000 exemplaires dans la province du Sud-Kivu en 2011, cette BD constituera à la fois un support pédagogique pour la lecture dans une région où les livres sont quasi inexistants et un outil d’information et de prévention ludique et accessible contre le Sida.
Acheter cette BD en France est un acte de solidarité : l’intégralité des bénéfices tirés de la vente de la BD est reversée à l’association congolaise SOS Sida, partenaire de ce projet, pour soutenir son action sur le terrain. La vente des Diamants de Kamituga participe ainsi directement à la lutte contre le Sida et donne un espoir aux femmes congolaises victimes de violences sexuelles.
Pour se procurer l'album :
www.lesdiamantsdekamituga.com

NDLR: Pour ceux qui connaissent la région, il est bon de noter que Kamituga était connu pour son or, mais pas pour des diamants.

lundi 14 mars 2011

Région des Grands Lacs - Coopération sur l’exploitation des minerais

Six mois après la signature d’un décret interdisant l’extraction des minerais dans l’est de la République Démocratique du Congo, le Président congolais Joseph Kabila a décidé la levée de cette interdiction et la reprise de l’industrie minière au Kivu. Cette décision, supposée permettre la mise en place d’un cadre légal autour de l’exploitation des mines, doit entrer en vigueur aujourd’hui.Parallèlement, une rencontre entre Joseph Kabila et son homologue kényan Mwaï Kibaki s’est tenue il y a quelques jours à Nairobi, avec pour enjeu principal la lutte contre le commerce illicite des ressources congolaises dans la région des Grands Lacs.

A l’est de la RDC, des milices s’affrontent pour le contrôle des mines d’or, de coltan ou d’étain, ressources indispensables à l’approvisionnement en vivres et en armes de plusieurs groupes rebelles. En septembre dernier, sous l’impulsion d’une communauté internationale préoccupée par l’intensification des violences au Nord et au Sud-Kivu, le Président congolais a décidé l’arrêt temporaire des extractions minières. Dans certains pays occidentaux et au sein de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL), plusieurs initiatives ont été mises en place afin d’assurer la traçabilité des matières premières et le contrôle par l’Etat de l’exploitation des mines. La disparition des « minerais du sang » se trouve ainsi aujourd’hui au cœur de nombreux débats.

Sur le terrain pourtant, plusieurs témoignages ont fait état de la poursuite des extractions depuis septembre et du contrôle de certains territoires par les rebelles du Kivu. En réalité, les miliciens – issus de groupes armés congolais, rwandais et ougandais – se sont alliés à des membres des FARDC (Forces Armées de la RDC) pour le contrôle des mines ou la mise en place de barrages routiers dont le franchissement est soumis au versement d’une somme d’argent. En effet, de nombreux anciens miliciens ayant déposé les armes ont été intégrés aux FARDC tout en continuant à faire allégeance à leurs anciens chefs rebelles. En outre, du fait des dysfonctionnements au sein de la fonction publique congolaise, la participation de militaires corrompus aux activités illicites des milices est relativement fréquente.

Un nouvel accord relatif à l’extraction des minerais dans les régions du Kivu et de Maniema a donc été approuvé début mars par le ministre des Mines et les gouverneurs des provinces concernées. Le décret d’interdiction décidé par Joseph Kabila n’ayant pas permis une prise de contrôle étatique sur l’exploitation des ressources, la légalisation de l’extraction et le déploiement d’agents chargés de la traçabilité des minerais sont apparus inévitables. Toutefois, en raison de l’implication de réseaux internationaux dans le trafic des ressources congolaises, seule une coopération interétatique semble en mesure de contrer la montée en puissance des mouvances rebelles dans l’est du pays. Le 3 février dernier à Goma (Nord-Kivu), deux occidentaux ont ainsi été arrêtés par les autorités congolaises alors qu’ils s’apprêtaient à rapatrier illégalement un chargement d’or. Quelques semaines plus tard, deux tonnes d’or volées en RDC ont été retrouvées sur le sol kényan ; la cargaison était en partance pour les Emirats Arabes Unis. Le fonctionnaire en charge de l’enquête a par la suite été retrouvé mort à proximité de son domicile. Ces récents événements soulignent la montée en puissance d’un réseau de contrebande international dont les enjeux dépassent largement le cadre de la RDC. Joseph Kabila et Mwaï Kibaki ont ainsi décidé la mise en place d’une commission d’enquête conjointe sur le commerce illicite des ressources naturelles de la région, notamment l’or, le coltan et l’étain en provenance du Kivu. Le Kenya ferait en effet figure de point de transit entre la RDC et les pays du Golfe persique, où les contrôles sur l’origine des matières premières se font plus rares que dans les pays occidentaux.

Néanmoins, au regard des difficultés d’accès rencontrées par les autorités de Kinshasa dans les régions de l’est du pays et des multiples complicités au sein des forces de l’ordre congolaises et rwandaises, une disparition des « minerais du sang » semble peu envisageable à court et moyen terme. En effet, les autorités rwandaises exporteraient les ressources congolaises en tant que production locale, déjouant ainsi les contrôles internationaux sur l’origine des minerais. Ainsi, l’or, le coltan et la cassitérite ont représenté 30% des exportations rwandaises en 2010, alors que leur production demeure très faible dans ce pays. Toutefois, les implications transnationales relatives aux luttes armées du Kivu et au contrôle de ses mines sont susceptibles d’entraîner une multiplication des initiatives régionales et internationales sur ce sujet, sous l’impulsion de la communauté internationale et de grandes entreprises soucieuses d’assurer la transparence quant à leur approvisionnement en matières premières.

NDLR : source de l’article : www.armee.com

RDC : L'activité minière reprend, les trafics aussi

Après 6 mois d'interdiction, l'activité minière a de nouveau été autorisé dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Mais pendant cette période, le pillage des ressources naturelles a continué, dénonce l’Association africaine des droits de l’Homme (ASADHO). Pour cette association, l'interdiction décidé par Joseph Kabila n'a pas arrêté les trafics illicites de minerais et a privé la population des ressources de la production minière. Un double échec pour cette ONG qui demande de nouvelles mesures gouvernementales pour lutter contre le pillage des ressources naturelles congolaises.
filtre DSC02372.jpgDes groupes rebelles et des milices locales toujours actifs dans le Nord et le Sud-Kivu, mais aussi des militaires congolais, sont régulièrement accusés d'exploiter illégalement les minerais dont ces provinces regorgent (cassitérite, coltan, or…). L'arrêt de l'exploitation minière dans les trois provinces avait été décidé le 9 septembre par le chef de l'Etat congolais Joseph Kabila. Il avait alors dénoncé l'activité de "groupes mafieux" et aussi "l'implication" d'autorités locales, provinciales, et nationales, civiles et militaires, dans le commerce illicites de minerai, qui ne profitait pas aux populations.
Après six mois d'interdiction, cette mesure vient d'être levée par les autorités congolaises et le constat est amer pour l’Association africaine des droits de l’Homme (ASADHO) qui se dit préoccupée par la levée de la mesure de suspension des activités minières dans les provinces du Maniema, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
Pour cette ONG, l’objectif pour lequel, la suspension a été imposée n’a pas été atteint. Selon l'ASADHO, la suspension de l'activité minière a "favorisé le pillage des ressources naturelles". L’Association recommande au président de la République de "faire ouvrir une enquête qui devra identifier toutes les autorités civiles, militaires et de la Police nationale impliquées dans l’exploitation illégale des minerais à l’Est et les faire traduire devant les juridictions compétentes". L'ASADHO demande aussi aux autorités congolaises d'accélérer "la mise en place du mécanisme de certification des minerais de l’Est ainsi qu'un engagement ferme dans la lutte contre l’impunité dans le domaine des ressources naturelles à l’Est de la République démocratique du Congo". Le communiqué de l'ASADHO fait enfin remarquer un paradoxe : certains militaires et policiers affectés à l’Est et très impliqués dans l’exploitation illégale des minerais ne pouvaient pas assurer la garde des carrières minières fermées sans les exploiter eux-mêmes !

NDLR : Voeu pieux dans un pays où le vol et le pillage sont une institution !!