jeudi 14 octobre 2010

RDC : Pression maximum autour de Bosco Ntaganda

La situation devient plus en plus embarrassante pour le gouvernement congolais, sommé par Human Rights Watch de procéder à l’arrestation de Bosco Ntaganda. Ce général de l'armée congolaise tombe en effet sous le coup d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI). Depuis janvier 2010, Ntaganda a été impliqué dans l'assassinat d'au moins huit personnes, les arrestations arbitraires de sept autres personnes, ainsi que l'enlèvement et la disparition d'au moins une autre personne. Mais le gouvernement congolais refuse toujours de le livrer à la justice, prétendant que Ntaganda est nécessaire pour maintenir les anciennes troupes rebelles du CNDP intégrées au sein de l'armée congolaise... jusqu'à quand ?
772533361.jpgPour Human Rights Watch (HRW) : "il faut arrêter Bosco Ntaganda !". Dans une lettre au président Kabila, HRW affirme que l'impunité de Ntaganda n'est plus supportable :

"Ntaganda devrait être arrêté et tenu de répondre de ses crimes, au lieu d'être autorisé à se déplacer librement dans Goma », a déclaré Anneke Van Woudenberg, chercheuse senior au sein de la division Afrique à Human Rights Watch. « Cet homme constitue une menace pour les habitants de l'est du Congo, et l'impunité dont il bénéficie tourne en dérision la politique de tolérance zéro du gouvernement congolais pour les atteintes aux droits humains. »
La majorité des personnes prises pour cible par Ntaganda sont des membres de la famille ou d'anciens partisans du chef rebelle Laurent Nkunda, évincé par Ntaganda en janvier 2009 de la direction des rebelles du Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP), avec l'aide des autorités militaires du Rwanda. Après s'être emparé de la direction du CNDP, Ntaganda a annoncé la fin de la rébellion. Il a affirmé qu'il intégrerait les troupes rebelles au sein de l'armée nationale congolaise, pour mener des opérations conjointes avec les forces armées rwandaises contre les Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR), groupe rebelle composé essentiellement de Hutus rwandais.
Ntaganda s'est assuré un poste de général dans l'armée congolaise. Le gouvernement congolais a indiqué qu'il n'exécuterait pas le mandat d'arrêt émis par la CPI contre Ntaganda dans l'intérêt du maintien de la paix, prétendant que Ntaganda est nécessaire pour maintenir les anciennes troupes du CNDP intégrées au sein de l'armée congolaise.
Le putsch de Ntaganda, ainsi que l'arrestation et la détention ultérieures sans chef d'accusation de Nkunda au Rwanda, ont profondément divisé le mouvement du CNDP. Un certain nombre de partisans de Nkunda se sont opposés à la direction de Ntaganda, même s'ils ont pris leurs nouvelles fonctions au sein de l'armée congolaise. D'autres civils et activistes sans liens avec le CNDP ont également été les cibles d'arrestations arbitraires et d'actes d'intimidation de la part de Ntaganda et de ses partisans, après avoir dénoncé les violations des droits humains commises par Ntaganda et appelé à son arrestation.
La participation de Ntaganda aux opérations militaires dans l'est du Congo cause en outre des problèmes importants pour la mission de stabilisation de l'ONU au Congo, la MONUSCO. Le 6 octobre, l'agence de presse Reuters a publié une interview exclusive de Ntaganda au cours de laquelle il confirmait jouer un rôle de premier plan dans les opérations militaires dans l'est du Congo, baptisées Amani Leo, et soutenues par les soldats de maintien de la paix de l'ONU.
La confirmation par Ntaganda de son rôle est corroborée depuis 2009 par des notes internes de réunions de l'armée, des ordres militaires signés et la confirmation de la part d'autres officiers de l'armée que Ntaganda leur donne des ordres. Le gouvernement congolais continue de nier que Ntaganda joue un rôle dans l'opération Amani Leo.
Selon la politique de conditionnalité adoptée par la MONUSCO fin 2009 pour appuyer les opérations militaires de l'armée congolaise, et d'après les avis juridiques des propres avocats de l'ONU, la MONUSCO ne peut pas soutenir une opération dans laquelle un individu visé par un mandat d'arrêt de la CPI joue un rôle prépondérant.
Le Bureau des affaires juridiques de l'ONU (Office of Legal Affairs, OLA) a donné en avril 2009 à la mission de maintien de la paix de l'ONU l'avis suivant : « Il y aurait aussi des obstacles juridiques importants à la participation de la MONUC à l'opération envisagée dans la Directive si Bosco Ntaganda devait jouer un rôle important dans cette opération, que ce soit en tant que commandant ou officier supérieur dans une ou plusieurs des unités des FARDC impliquées, ou comme officier d'état-major impliqué dans la planification ou l'exécution de l'opération ou de tout autre façon. »
Le Conseil de sécurité de l'ONU doit débattre de la question de la mission de maintien de la paix de l'ONU au Congo cette semaine à New York.
« La mission de l'ONU devrait fournir son soutien au gouvernement congolais pour arrêter Ntaganda, comme cela a été le cas pour d'autres auteurs d'atteintes aux droits humains, et suspendre d'ici là son soutien aux opérations Amani Leo », a conclu Anneke Van Woudenberg. « Sinon les soldats de maintien de la paix de l'ONU se trouveront dans une position intenable consistant à soutenir un criminel de guerre présumé recherché par la CPI.
"