RD Congo : Situation toujours tendue à l’Est
Par Le Potentiel
Le Programme Amani censé amener la paix dans les Kivu en est encore aux premiers balbutiements. La localité de Mutabo, dans le Rutshuru, a enregistré la violation du cessez-le-feu par les FARDC et le CNDP. En province Orientale, les Maï-Maï ont attaqué les FARDC dans le territoire de Bafwasende. 18 soldats, plus de 30 Maï-Maï et un civil tués. Mille personnes déplacées. La situation est à ce point volatile, dans l'Est, qu'elle exige des réactions aussi rapides que pragmatiques.
C'est désormais classique. Pas d'actualités de la RDC, chaque jour, sans l'annonce de nouveaux combats opposant soit les Forces armées de la République aux groupes armés. Soit les groupes armés entre eux. Ceci démontre combien est précaire la situation sécuritaire tant au Nord-Kivu qu'au Sud-Kivu ainsi que dans la province Orientale. En témoigne le dernier point de presse tenu le mercredi 25 juin 2008, par Alan Doss, le Représentant spécial du Secrétaire général de l'Onu en RDC et chef de la Monuc.
Le cessez-le-feu a été violé à Mutabo (Rutshuru), la semaine dernière, à la suite des affrontements entre les Forces armées de la République (FARDC) et les miliciens du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de L. Nkunda. Bien que l'escalade d'actions militaires ait été évitée par la mise en œuvre du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, la situation, selon Alan Doss, «reste tendue entre les FARDC et le CNDP».
Une mission d'information de la Monuc et de la Facilitation internationale, composée de civils et de militaires, a dû se rendre à Rutshuru et à Bunagana (Nord-Kivu) le 19 juin. Soit un jour après les incidents de Mutabo. De l'avis du Représentant spécial de Ban-Ki moon, les affrontements de Mutabo représentent «les premiers accrochages sérieux entre les FARDC et le CNDP après la signature de l'Acte d'engagement du 23 janvier 2008, et depuis les combats de décembre 2007 dans les territoires de Masisi et de Rutshuru».
TENSION PERMANENTE
Au Nord-Kivu, la tension est permanente et le calme précaire. Alan Doss révèle que les installations de la Monuc, à Rutshuru, ont été visées les 23 et 24 juin 2008 par plusieurs centaines de manifestants. Ils exigeaient le retrait de la Force de la Monuc de Mutabo, afin que les FARDC y retournent après s'en être retirées le 22 juin.
Cette agitation ne s'est pas terminée sans préjudice. Le chef de la Monuc donne le bilan : «Au moins une personne a été tuée par les forces de l'ordre quand les manifestants ont jeté des pierres vers le cortège du vice-gouverneur du Nord-Kivu, qui s'était déplacé à Rutshuru pour visiter les installations de la Monuc».
En outre, durant les manifestations, «plusieurs personnes ont été blessées, dont deux par balles ; 6 Casques bleus ont également été blessés par le jet des pierres». Pas plus tard que dans la nuit de jeudi à vendredi, des tirs ont été entendus à Kabare et à Bagira. Cette fois, ce sont les soldat de la 14ème brigade FARDC intégrée qui s'étaient mis à tirer
Pendant que les accrochages opposent les FARDC aux hommes de L. Nkunda au Nord-Kivu, la province Orientale revient sur la sellette. Cette fois, ce sont les Maï-Maï du major Luc qui ont, le 17 juin, attaqué les FARDC de la 9ème Région militaire basée dans la zone minière d'Elonga, en territoire de Bafwasende. L'attaque est survenue deux semaines après l'arrêt officiel des opérations militaires lancées contre eux.
Selon le Représentant spécial du secrétaire général de l'Onu, les actions Maï-Maï ont fait plusieurs tués depuis fin mai: 18 soldats des FARDC, plus de 30 Maï-Maï et un civil. Autre conséquence collatérale des combats, la situation humanitaire est préoccupante à Bafwasende, qui compte environ 1000 personnes déplacées, en quête d'assistance.
La province Orientale est, en outre, confrontée à un autre problème sécuritaire : il s'agit de la présence sur son sol des éleveurs nomades, les Mbororo, venus du Soudan. Leurs rapports avec les populations locales sont de plus exécrables. Le gouvernement de Kinshasa n'a pas encore trouvé un compromis avec celui de Khartoum pour régler la question.
SITUATION PREOCCUPANTE
Que ce soit en province Orientale ou au Kivu, la situation demeure préoccupante. Six mois après la signature, en janvier 2008 à Goma, de l'Acte final de la Conférence pour la paix, la sécurité et le développement dans les provinces du Kivu, l'espoir soulevé à l'époque dans la population est retombé. En mai et juin, selon la Monuc, des violations sporadiques du cessez-le-feu ont été signalées. Comme d'habitude, les signataires de l'Acte d'engagement de janvier 2008 se rejettent mutuellement la responsabilité des escarmouches et des lenteurs.
Scénario classique, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), les groupes Maï-Maï et les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) sont régulièrement impliqués dans des escarmouches entre eux ou avec les Forces armées de la RDC. Le recrutement forcé d'enfants soldats par des Maï-Maï est constamment dénoncé par la Monuc.
Quant au Programme Amani (la paix, en swahili) décidé lors de la conférence de Goma et destiné à sécuriser et à reconstruire les deux Kivu, il n'a été mis en place que le 3 avril. Par ailleurs, les travaux de la Commission technique mixte Paix et Sécurité ont été interrompus en raison de désaccords sur la représentation des groupes, avant de reprendre le 13 juin. Concernant la Sous-commission humanitaire et sociale, centrée sur le sort des déplacés et réfugiés, elle poursuit ses travaux.
En dépit de ces signaux contradictoires sur le terrain, le processus de paix se poursuit avec, néanmoins, beaucoup d'atermoiements. Les officiels sont certes moins pessimistes, affirmant que la paix ne s'obtient pas du jour au lendemain. Mais les populations locales, elles, attendent désespérément le retour de la paix.
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